31 juillet 2019

Là-bas, la beauté - Henri Texier quintet



Vendredi – concert du soir. La place devant l’abbatiale est pleine pour écouter le multigénérationnel quintet d’Henri Texier. Au début, la facture semble très classique : un long solo à la contrebasse propose une mélodie grave, puis les instruments entrent l’un après l’autre pour déclarer le thème ensemble. Ils reprennent chacun la parole à tour de rôle et une reprise de la mélodie clôt le morceau. Habituel, le thème, les chorus, le thème. Pourtant, quelque chose perturbe ce rouage rodé : les solos sont extrêmement longs, grands espaces de liberté dans un paysage simple, moments étendus pour broder en dentelle ou en découdre en puissance. Et tel un tableau ou une sculpture qui naîtrait devant le public, le groupe joue des couleurs et des textures de chaque instrument : il dessine « Les là-bas » et les humains qui les peuplent, « Sand Woman », « Hungry Man » et l’Indien Micmac du Canada. Au-delà des chorus, les instrumentistes interagissent entre eux, dialoguent et éclairent des images complexes. Puis ensemble ils jouent « Amir », un morceau composé et joué en contrebasse solo par Henri Texier dans les années 1970. Ils arrivent à l’intime, à la spiritualité et au corps, au gré de la sobre clarinette, du duveté du sax baryton et de l’exacte délicatesse de la guitare ; ils arrivent à l’essence, à deux notes jouées sur une contrebasse, qui suspendent le temps et l’espace. Après un court dialogue avec le contrebassiste, le batteur se dévoile, longtemps, puissamment. « Quand tout s’arrête », le temps d’un rappel, plusieurs centaines de personnes voyagent aux là-bas de la beauté.
Henri Texier, contrebasse ; Sébastien Texier, saxophones et clarinettes ; François Corneloup, saxophone baryton ; Manu Codjia, guitare ; Gautier Garrigue, batterie
Marie-Françoise