20 juillet 2018

Rencontre avec les Karpates Show


Les Karpates Show, un groupe venu « des Carpates marnaises, une région montagneuse de la Champagne, qui culmine à 272 mètres» comporte quatre membres : Igor Batchev (Xavier), Clara Ponsinov (Clara), Vassili (Pierre) et Vladimir (Didier).

Pourquoi vous êtes vous tournés vers les musiques d’Europe de l’Est ?
Ce sont des musiques sans frontières. Elles plaisent à toutes les générations. Ce ne sont ni des musiques de jeunes ni des musiques de vieux. En cela, les musiques populaires rejoignent le jazz. Par ailleurs, comme lui, elles reposent sur l’improvisation. Nous-aussi, nous jouons avec l’improvisation. Dans ce groupe, il y a d’excellents improvisateurs : Clara a fait l’école Didier Lockwood, Xavier a une grande expérience en jazz et Pierre est un excellent soliste en guitare manouche en plus de jouer de l’accordéon. On n’est pas un ensemble traditionnel de fanfare tzigane, à dix ou douze personnes, avec de nombreux cuivres.
On joue beaucoup le répertoire des Balkans, des rythmiques composées en 7 temps, 9 temps, … On touche un peu au Klezmer, à la chanson française. Il y a aussi un morceau grec, un italien, des références au cinéma de Kusturica bien sûr, à La Vie est un miracle, Le Temps des gitans, Chat noir, chat blanc.

Comment vous êtes-vous rencontrés ?
L’histoire du groupe est un peu compliquée. Didier et Philippe, l’accordéoniste, ont formé le groupe en 2014. Des musiciens appartenant à la troupe initiale sont aujourd’hui très peu disponibles. Le premier violoniste, Léo, joue aussi avec Saramabalouf qui tourne énormément. C’est une formation à géométrie variable ; on peut être 5, 6… Didier et moi (Xavier) nous connaissons depuis 25 ans. On a rencontré Clara et Pierre il y a un an. On a souvent un deuxième violoniste et un percussionniste avec nous. Les contraintes économiques font que nous, les quatre membres du Politburo, jouons beaucoup ensemble. On a le goût commun de cette musique chaleureuse, communicative, festive, populaire.

Que représente pour vous le fait de jouer en déambulant ?
Ce sont des aventures. En général, on joue quelques morceaux ici puis quelques autres là. Jouer en marchant, bien que ça nous arrive, est plus difficile, plus physique, surtout lorsqu’on a un instrument dans la bouche ! On aime être mobiles, être autonomes. On a un petit ampli pour le violon, un porte-voix, un landau.  
On se scénarise de plus en plus. On a inventé un pays imaginaire, la Tatouasie, un pays peu démocratique à côté de l’Océtie. On a un chef de partie, deux militaires…On se trimbale avec une drôle de valise au symbole radioactif. On parle à moitié russe et très souvent, les gens sont pris au piège, car ils pensent qu’on est vraiment russes.

Vous parlez russe ?
C’est du Russe de bazar. Xavier, lui, a appris le Russe, au collège et au lycée, mais ça fait longtemps ! On importe les mystères de l’Est. On joue avec l’image des anciens pays du bloc de l’Est, les démocratures actuelles qui savent bien empoisonner au polonium. On a un aspect russkoff, un peu brutal, pas aimable alors que notre musique est très aimable.

"Karpatt Show", c’est aussi "Carpaccio" ?
Oui, c’est saignant. Didier aime beaucoup les jeux de mots, les calembours.

Quel est le morceau que vous préférez jouer ?
Xavier : Freylech parce qu’il y a deux parties, une très lente et une très rapide. J’aime aussi les chansons que je chante : celle de Boris Vian et celle d’Edith Piaf. Il n’y a pas d’enregistrement de Vian de L’Âme slave mais Higelin l’interprète dans son premier album en 1965. C’est une performance car il réussit à la chanter en moins de deux minutes.
Clara : J’aime jouer les morceaux aux mesures asymétriques, ceux en 7 temps ou en 9 temps, typiques des musiques d’Europe de l’Est, comme Gankino Oro.
Pierre : In the death car et Bubamara me renvoient vraiment aux émotions suscitées par l’art de Kusturica.
Didier : Je les aime tous ! j’aime ceux que j’ai arrangés, comme Fliying bulgar. J’aime mettre des morceaux dans les morceaux. On aime s’amuser. Il faut s’amuser.

Que vous procure le fait de venir à Souillac ?
C’est un bonheur. Je (Didier) suis déjà venu il y a quelques temps pour une formation de swing vocal. Il y a des gens charmants. On est bien accueilli. Il y a du bon public. Le temps est magnifique et on peut jeter les déchets nucléaires dans la rivière !
Pierre habite en banlieue parisienne, nous habitons à Reims. Chez nous, il n’y a pas de vraies montagnes. On éprouve un répertoire, en acoustique, pour un public inconnu. C’est un défi intéressant. Nous sommes enchantés d’être ici.

Les propos ont été recueillis et retranscrits par Loreleï Giraudot et Marie-Françoise Govin