Le Wonder Brass Band en concert d'ouverture
Le Wonder Brass Band, formation toulousaine
composée de six musiciennes, en concert d’ouverture du 41e
festival de jazz de Souillac, le 17 juillet à 21h15, place de l’église à
Pinsac.
Eline Groulier, trombone - Sarah Mange, saxophone soprano - Caroline Decours, soubassophone - Anaïs Andret-Cartini, trompette - Elodie Longuemart, caisse claire - Wilma Ambrosio, grosse caisse
Entretien avec
Caroline Decours, tubiste, au
soubassophone dans le Wonder Brass Band.
Marie-Françoise Govin : Vous jouez du soubassophone, ce qui n’est pas très fréquent.
Caroline Decours : Oui, enfant, j’ai
appris la flûte et quand j’ai découvert le tuba, je suis tombée amoureuse de
cet instrument. Et j’ai fait des études de tuba classique. Avec le Wonder Brass
Band, j’ai choisi le soubassophone parce que c’est plus évident pour les
concerts de rue. J’aime ce rôle de bassiste. Ces sons graves bien ancrés,
j’adore…
C’est un instrument un peu ingrat, je l’appelle
l’anarchiste. C’est difficile de centrer les sons, il faut vraiment être très
précis, ça roule, ce n’est pas toujours très juste. Un instrument difficile à
dompter que je suis d’autant plus contente de défendre à ma mesure,
MFG : Pouvez-vous
nous parler de l’histoire du Wonder Brass Band ?
CD : Il est
né d’une amitié au conservatoire : nous somme trois musiciennes à avoir
fait nos études au conservatoire de Toulouse. À cette époque, nous voyions nos
copains masculins partir jouer les week-ends et nous, nous restions sur les
bancs du conservatoire. Toutes les trois, nous jouions d’instruments en cuivre,
plutôt masculins et nous avions beaucoup de mal à nous intégrer dans des
projets, toujours mixtes. Nous nous sommes demandées : Pourquoi est-ce
qu’on ne monterait pas un groupe ? Nous étions trois et nous avons demandé
des arrangements à nos amis. Au début, nous n’écrivions pas nos arrangements et
des copains nous ont aidées pour monter ce groupe. Par la suite, nous avons
passé des annonces, pour savoir si d’autres musiciennes voulaient participer à
ce projet. À ce moment-là, nous nous sommes dit : pourquoi pas seulement
des filles ? Nous avons rencontré des musiciennes d’horizons très très
très différents. Nous savions quelle formation nous voulions : des cuivres
et des percussions. Et l’aventure a commencé comme ça en 2001.
MFG : Comment
êtes-vous passée du classique au jazz ?
CD : Beaucoup
de nos amis étaient dans des classes de cuivre et ils étaient très influencés
par le jazz et les musiques du monde. Nous allions les écouter et naturellement
nous avons été attirées par ces musiques-là, plus que par la musique classique
même si, par formation, nous avions travaillé les techniques à travers la
musique classique. Nous trouvions notre place dans cette émulsion-là, dans cette
ouverture culturelle et musicale à d’autres horizons.
MFG : Vous ne
venez pas toutes les six de la musique classique ?
CD : Non parce
que le Wonder Brass Band est né d’une rencontre, il présente beaucoup de
diversités. Anaïs, la trompettiste, - son père tenait le Mandala-, nous apporte
beaucoup de disques et on écoute beaucoup de musique du monde et du jazz
évidemment. Quand elle propose des arrangements ou des morceaux, elle amène sa
patte. Éline, la tromboniste, elle est passionnée par le funk et la musique
latine. La percussionniste pratique aussi beaucoup la musique latine. Élodie,
la batteuse, est plus « métal ». Sarah, la saxophoniste, est férue de
jazz ; c’est une mine en connaissances de jazz. Dans le camion, quand nous
partons jouer, chacune amène ses influences. Ça se retrouve aussi dans nos
compositions.
MFG : Pourquoi
un brass band ? À cause des instruments ?
CD : Oui.
Parce qu’avec nos instruments, anches, cuivres et percussions, on a tout de
suite voulu ce type de formation.
MFG : Vous
vous rattachez à une culture traditionnelle du brass band ?
CD : Non,
nous ne nous n’utilisons pas le répertoire des brass bands anglo-saxons
traditionnels. C’est très particulier le brass band anglo-saxon. Le Wonder est
beaucoup plus proche de la musique festive, celle de la rue. On aime la
proximité avec les gens, on aime l’esprit du brass band new orleans. On peut dire que le Wonder est proche des brass bands
américains qui déambulent dans les rues.
MFG : Vos
costumes et votre jeu de scène ont évolué ces deux dernières années. Quels sont
la place et le rôle des costumes?
CD : Nous
avons chacune une façon différente d’appréhender notre corps et les costumes ont
été le sujet de nombreuses discussions. Nous sommes très différentes toutes les
six. Après plusieurs expériences d’uniformité, nous avons décidé d’affirmer chacune
notre personnalité à travers les costumes.
En 2012 nous avons fait appel à une costumière de
Toulouse, qui travaille par ailleurs je crois avec l’orchestre du Capitole. Elle
a su recueillir nos différentes personnalités et nous a proposé des croquis. On
se retrouvait bien chacune.
Ensuite, nous avons voulu changer. Après une expérience
infructueuse, nous avons choisi un code couleurs –le noir et le blanc- et nous
trouvons nous-mêmes nos propres tenues. Désormais nous voulons quelque chose de
plus classique et même plus classe, justement parce qu’on est dans la rue. Nous
n’avons pas envie de mettre de la distance mais de dégager quelque chose de
plus classe. Depuis que nous avons choisi ces couleurs, le noir et le blanc,
qui ne sont pas forcément très avenantes, nous remarquons qu’on en voit de plus
en plus dans la rue. Au début, nous voulions créer un décalage parce que nous
trouvions que trop de couleurs n’aidaient pas forcément notre musique. Nous
voulions aussi que ce soit plus féminin. Mais l’image c’est très compliqué à
travailler
MFG : Votre
spectacle est mis en scène. Comment ? pourquoi ?
CD : La
scénographie est née de notre envie de communiquer avec le public, de jouer
avec les spectateurs. Petit à petit nous sommes devenues plus exigeantes, surtout
pour améliorer la communication avec le public. Nous trouvions qu’un peu de
mise en scène manquait et que c’était très brouillon. Nous avons fait appel à Marie
Puech, qui est chorégraphe. Elle a l’habitude de mettre en espace des
spectacles. Elle est venue nous voir plusieurs fois et nous a proposé un
travail qui a duré trois ans. C’était exigeant et ça nous demandait quelque
chose qu’on n’avait pas l’habitude de faire : bouger, se déplacer, parler
avec les gens. Nous avons fait un gros travail fait sur nous-mêmes et aussi
collectivement : utiliser les forces et les faiblesses des unes et des
autres pour arriver à quelque chose d’assez cohérent.
MFG : Est-ce
que tout est calé ou y a-t-il des moments d’improvisation scénique ?
CD : Au
niveau des morceaux, la scénographie est construite autour de blocs :
chacune sait ce qu’elle va faire, connaît les enchaînements (on sait qu’il y a
des pas à droite, à gauche…). Mais nous essayons de nous adapter à l’endroit,
le plus souvent la rue, de l’apprivoiser. Parfois, on est touchées par des gens,
alors nous entourons la personne pour jouer. Ou bien, dans un cadre qui nous
inspire, on va prendre des positionnements différents mais on reste dans la scénographie.
Par exemple, on sait que pendant les chorus de Sarah nous ne devrons pas la
lâcher ; quoiqu’elle fasse on la suivra.
MFG : Vous
allez jouer à Pinsac sur une scène et pas dans la rue.
CD : On a
aussi travaillé la scène, et si ce n’est pas notre lieu habituel, on aime
beaucoup beaucoup ça. La rue nous correspond plus sans doute parce qu’on en a
plus l’habitude et la proximité avec les gens nous plaît. La scène, c’est
différent.
MFG : La
scène à Pinsac est installée devant l’église et permet la proximité : il y
a les villageois, les estivants qui viennent des campings et des locations et
aussi des festivaliers de Souillac en jazz. C’est très familial et bon enfant.
Le public est assis mais dans une très grande proximité avec la scène.
CD : La
scénographie est différente selon que nous jouons sur la scène ou dans la rue mais ce qui change le plus c’est la
sonorisation. Quand c’est en acoustique, sans sono, ça nous va très bien ;
on aime cette ambiance, elle nous met à l’aise et nous permet de voir les gens
et de pouvoir être avec eux parce que la musique c’est avant tout un partage.
MFG : Vous
faites le concert d’ouverture du festival et nous aimons bien que le festival commence
par un concert gratuit avec un public très varié et une grande proximité. Maintenant
que vous nous avez expliqué tout ce qui est autour de la musique, il est temps
de vous demander : quelle est votre musique ?
CD : Au
début des amis, très gentils, nous arrangeaient des morceaux et nous ne
choisissions pas trop le répertoire. Nous prenions des morceaux de groupes qui
nous plaisaient. Pourtant, au fur et à mesure, nous avons souhaité que notre
musique nous ressemble. À partir de ce moment-là, nous avons refait nous-mêmes
nos arrangements, avec nos diverses influences et goûts esthétiques. Et maintenant
nous composons. Les compositions, en fonction de celle qui va composer le
morceau, va sonner plus latin, plus funk, plus jazz, plus musique du monde. Élodie,
qui est passionnée de « métal », nous a amené un morceau bien
dynamique. Ainsi, nous essayons de donner à ce groupe à la fois une diversité
et une identité qui nous appartienne à toutes et dans laquelle chacune met sa
personnalité.
Souvent on amène sur un papier une composition et nous
réarrangeons collectivement. Nous discutons beaucoup et nous construisons l’arrangement
en combinant la musique et la personnalité de chacune. Dans le spectacle, il y
a donc des compositions et des arrangements que nous avons réadaptés.
Nos arrangements s’appuient sur de la musique festive même
si ce mot est un peu trop vague : quelques standards de jazz comme Watermelon Man, de la musique new orleans aussi, celle des Mardi Gras Brass
Bands (sous l’influence du River brass band par exemple) ou des morceaux plus
pop ou plus disco. Nous mélangeons des musiques qui parlent aux gens et des
compositions du Wonder.
MFG : Il ya
de plus en plus de compositions ?
CD : Oui,
et c’est un risque parce que les compositions peuvent éveiller la curiosité
mais aussi dérouter mais nous voulons que notre musique nous ressemble.
MFG : Vous jouez
dans d’autres festivals ?
CD : Oui et
nous remarquons que, depuis que nous jouons nos compositions, nos prestations
ont été choisies essentiellement par des festivals, et souvent de jazz.
MFG : Et
sinon ?
CD : Des
festivals polyvalents comme « 31 Notes d’été » et autour de la femme
aussi. Nous avons joué aussi au festival « DARC au pays » à
Châteauroux, qui est un festival de danse.
Merci de votre gentillesse et de votre enthousiasme. Nous sommes impatients
de vous écouter à Pinsac, le dimanche 17 juillet.
Marie-Françoise
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