Tigran au Théâtre Musical de Paris
Le 25 mars 2011.
Le théâtre du Châtelet est assurément l’un des plus beaux de la capitale. Les balcons, la corbeille et l’orchestre sont remplis à leur comble lorsque le jeune pianiste de vingt-trois ans fait son entrée sous des applaudissements nourris. Sans mot dire, il s’assied et règle minutieusement son tabouret. Les doigts s’échauffent, le corps se voûte sur le clavier. Dans la nef de cette cathédrale de silence, Tigran effleure les premières touches. Un son pur, juste et cristallin s’élève en volutes au-dessus du monstre noir de jais à la gueule béante. Le corps ondule de plus amplement, les notes s’accélèrent et la mélodie se construit. Sur son visage se lit ouvertement chaque son, chaque variation de rythme. La fougue de sa jeunesse s’emporte dans une volonté de dompter l’instrument massif. C’est dans cette maîtrise exaltée que Tigran nous joue son nouveau répertoire solo, qu’il accompagne de son timbre mystérieux lorsqu’il chante la poésie arménienne. Tantôt lyrique et envouté, tantôt brutal et passionné, tantôt aérien et embrumé, Tigran nous transporte dans son imaginaire complexe et délicat, entre la campagne venteuse d’Arménie, les torrents impétueux des contreforts du Caucase et les voiles nuageux accrochés au Mont Ararat. Dans ce voyage nous retrouvons le Tigran que nous connaissons, mais nous voulons qu’il nous emmène hors de ses propres frontières, dans l’inconnu et l’imprévisible.
Souhait réalisé, puisque dans la deuxième partie Tigran se lance dans des duos improbables. Il se fait d’abord accompagner du trompettiste Shane Endsley, qui de ses notes contenues pose le lit sur lequel la rivière mélodieuse du piano s’écoule. Il laisse la place à un jeune saxophoniste, Ben Wendel, long et courbé sur son cuivre avec lequel il valse, accompagnant et reproduisant en symbiose les rythmes de Tigran. Le troisième invité à monter sur scène est l’étonnant percussionniste Trilok Gurtu. Lui et Tigran se lancent dans un duo passionné, joueur et espiègle, sur les sonorités exotiques des étranges instruments de Trilok. Un numéro improvisé de beat box tient la salle en haleine pendant de longues minutes. Les deux musiciens se répondent du tac-au-tac et dialoguent passionnément dans cette langue pétaradante faite d’onomatopées et de borborygmes. Leurs jaillissements sonores exubérants finissent par s’unir et se confondre en une symbiose télépathique dans ce monde musical où il n’y a qu’eux pour se comprendre. Le jeune pianiste, qu’on pouvait sentir timide aux premiers abords, se dévoile joueur, complice, taquin. Entre les morceaux il fait quelques plaisanteries, jonglant entre un anglais impeccable et un français certes approximatif mais touchant.
Pour le dernier morceau de son spectacle il invite tous les musiciens sur la scène, que rejoint un batteur (Nate Wood) balayant une caisse claire. Tous les regards se tournent vers Trilok Gurtu. Celui-ci entame le morceau par un voyage dans la fraicheur des cours ombragées des palais arabiques. A l’aide d’une pléiade d’instruments surprenants, notamment une bassine d’eau et un verre, il recrée une ambiance délicatement exotique. Bientôt c’est au tour du piano de se lancer, et peu à peu tous les instruments s’accordent sur Tigran et baignent chacune de ses notes d’une enveloppe rythmée dans un bouquet final. La salle est conquise et rappelle Tigran sur la scène, cette fois pour un morceau plus intime, personnel.
Ce soir, le théâtre du Châtelet aura voyagé bien au-delà des murs de la capitale.
Boris
Le théâtre du Châtelet est assurément l’un des plus beaux de la capitale. Les balcons, la corbeille et l’orchestre sont remplis à leur comble lorsque le jeune pianiste de vingt-trois ans fait son entrée sous des applaudissements nourris. Sans mot dire, il s’assied et règle minutieusement son tabouret. Les doigts s’échauffent, le corps se voûte sur le clavier. Dans la nef de cette cathédrale de silence, Tigran effleure les premières touches. Un son pur, juste et cristallin s’élève en volutes au-dessus du monstre noir de jais à la gueule béante. Le corps ondule de plus amplement, les notes s’accélèrent et la mélodie se construit. Sur son visage se lit ouvertement chaque son, chaque variation de rythme. La fougue de sa jeunesse s’emporte dans une volonté de dompter l’instrument massif. C’est dans cette maîtrise exaltée que Tigran nous joue son nouveau répertoire solo, qu’il accompagne de son timbre mystérieux lorsqu’il chante la poésie arménienne. Tantôt lyrique et envouté, tantôt brutal et passionné, tantôt aérien et embrumé, Tigran nous transporte dans son imaginaire complexe et délicat, entre la campagne venteuse d’Arménie, les torrents impétueux des contreforts du Caucase et les voiles nuageux accrochés au Mont Ararat. Dans ce voyage nous retrouvons le Tigran que nous connaissons, mais nous voulons qu’il nous emmène hors de ses propres frontières, dans l’inconnu et l’imprévisible.
Souhait réalisé, puisque dans la deuxième partie Tigran se lance dans des duos improbables. Il se fait d’abord accompagner du trompettiste Shane Endsley, qui de ses notes contenues pose le lit sur lequel la rivière mélodieuse du piano s’écoule. Il laisse la place à un jeune saxophoniste, Ben Wendel, long et courbé sur son cuivre avec lequel il valse, accompagnant et reproduisant en symbiose les rythmes de Tigran. Le troisième invité à monter sur scène est l’étonnant percussionniste Trilok Gurtu. Lui et Tigran se lancent dans un duo passionné, joueur et espiègle, sur les sonorités exotiques des étranges instruments de Trilok. Un numéro improvisé de beat box tient la salle en haleine pendant de longues minutes. Les deux musiciens se répondent du tac-au-tac et dialoguent passionnément dans cette langue pétaradante faite d’onomatopées et de borborygmes. Leurs jaillissements sonores exubérants finissent par s’unir et se confondre en une symbiose télépathique dans ce monde musical où il n’y a qu’eux pour se comprendre. Le jeune pianiste, qu’on pouvait sentir timide aux premiers abords, se dévoile joueur, complice, taquin. Entre les morceaux il fait quelques plaisanteries, jonglant entre un anglais impeccable et un français certes approximatif mais touchant.
Pour le dernier morceau de son spectacle il invite tous les musiciens sur la scène, que rejoint un batteur (Nate Wood) balayant une caisse claire. Tous les regards se tournent vers Trilok Gurtu. Celui-ci entame le morceau par un voyage dans la fraicheur des cours ombragées des palais arabiques. A l’aide d’une pléiade d’instruments surprenants, notamment une bassine d’eau et un verre, il recrée une ambiance délicatement exotique. Bientôt c’est au tour du piano de se lancer, et peu à peu tous les instruments s’accordent sur Tigran et baignent chacune de ses notes d’une enveloppe rythmée dans un bouquet final. La salle est conquise et rappelle Tigran sur la scène, cette fois pour un morceau plus intime, personnel.
Ce soir, le théâtre du Châtelet aura voyagé bien au-delà des murs de la capitale.
Boris
1 Comments:
Très beau compte-rendu pour un concert qui devait l'être aussi :-)
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