28 juillet 2021

Velvet Revolution de Daniel Erdmann à Souillac le 22 juillet 2021

 

Jeudi soir 22 juillet a vu le festival de Souillac  pouvoir enfin  renouer avec son lieu le plus emblématique: la place Pierre Betz. Pour le concert attendu du trio "Velvet Revolution", sous une forme particulièrement inhabituelle de 1  saxophone ténor, 1 violon, 1 vibraphone. Il est constitué parmi les 3 de 2 musiciens  devenus  considérables déjà venus à Souillac et  ayant chacun secoué et parfois même divisé un  public pris par surprise par la grande originalité et la force de conviction d'une   musique très personnelle. Le trio Das Kapital en 2017  pour le saxophoniste Daniel Erdmann et le trio Django en 2018 du jeune violoniste Théo Ceccaldi
 
Daniel Erdmann, à cheval sur 3 cultures: allemande, américaine, française est reconnu comme un des plus grands saxophonistes européens: son identité au saxophone ténor est immédiatement reconnaissable à l'oreille  : sonorité puissante, timbre très dense en harmoniques, phrasé qui alterne les legatos les plus suaves avec des détachés percutants, alternance d'écarts de dynamique extrêmes, tout en maintenant une  grande sobriété d'expression ce qui peut sembler contradictoire. Théo Ceccaldi est tout simplement le dernier grand représentant  de la grande lignée des violonistes français. L'héritier des Grappelli, Ponty, Lockwood, avec  une technique violonistique  et  des propositions musicales qui  marquent fortement son identité. On notera son usage persistant de puissants pizzicatis comme assise rythmique de tout le groupe. Le britannique Jim Hart au vibraphone est encore méconnu mais reconnu comme  maître de cet instrument. Sa technique classique à deux mailloches alterne des passages très inhabituelles avec archet. Son imagination et sa technique impressionnane rencontre  celle de ses 2 compagnons. 
Velvet Revolution porte bien son nom. Révolution de velours (allusion à celle de Vaclav Havel en Tchécoslovaquie). Le velouté de la sonorité de Daniel Erdmann, les fulgurances et parfois l’âpreté de Théo Ceccaldi, la densité des harmonies de Jim Hart. La musique produite est originale et prenante. Les 2 cd déjà sortis ont été couverts de récompenses, les 3 musiciens couverts d'éloges. Ce soir sur la place Pierre Betz ils ont visiblement donné leur meilleur. Le répertoire est constitué  de pièces propres au groupe, principalement des compositions de Daniel Erdmann. Des mélodies prenantes parfois bouleversantes de simplicité apparentes. Typiquement un morceau se déroule de la  manière suivante : énoncé en valeur longue et sobre de la mélodie au saxophone  par Daniel Erdmann, en parallèle des développements fulgurants et stratosphériques de Theo Ceccaldi, entre ces deux voix extrêmes Jim Hart comble   le vide créé par des harmonies très riches et d'autres mélodies alternatives. Velvet Revolution est polyphonique. Malgré tout et de manière totalement intégré au projet chacun a eu une partie solo. On gardera en mémoire celle de Theo Ceccaldi qui nous a laissé pantois. Malgré une formule à priori difficile le public fut  touché par la prégnance des mélodies  de Daniel Erdmann et la force de conviction des 3 musiciens. Concert magistral, conclu en rappel par un standard inattendu: "Over The Rainbow" très sobre. Ce fut  tout à l'honneur du festival de Souillac de les avoir programmé. 
texte eric Rossignol, photo Jean-Claude Elisas Souillac en jazz 

Gonam City dans les grottes de Lacave le 20 juillet 2021

Mardi 20 juillet les grottes de Lacave ont été le théâtre d'un événement rituel et annuel : un concert organisé par le festival de jazz de Souillac qui en ce moment bas son plein. Après avoir reçu la grande contrebassiste Joëlle Léandre à Calès pour un concert qui fera date, c'est au tour du duo de Quentin Ghomari (trompettes) et Marc Benham (claviers) de donner son meilleur dans un lieu exceptionnel et inspirant de part sa vue souterraine (bien mis en lumière) et son acoustique inouïe qui se passe quasiment d'amplification. 
Le duo nous a donné  le  programme de son album Gonam City. Gonam est la contraction de leur 2 noms et fait allusion a Gotham City la ville de Batman c'est à dire New York. La musique y est ébouriffante d'inventivité et d'interaction sans relâches. Un répertoire étonnant qui va de Fats Waller, Duke Ellington à Thelenious Monk en passant par Dizzy Gillespie, Bud Powell, Parker et.... Sidney Bechet dont la version de "petite fleur"  nous a pris par surprise. Il y a l'extrême rareté de l'instrument utilisé sur ce morceau, la trompette à coulisse, un délice sonore par son extrême finesse , et l'accompagnement somptueux élaboré au clavier Fender Rhodes par Marc Benham. Non contents de maîtriser et d'actualiser respectueusement un répertoire large ils nous ont offert à intervalles réguliers des pièces de leur cru construites sur des formes libres truffées de dissonances tout à fait contemporaines. 
 
 Un mot sur les instruments et instrumentistes. Quentin Ghomari issu du CNSM de Paris joue en virtuose tour à tour de la trompette, de la trompette à coulisse, du bugle, avec une technique apparemment sans limite. Marc Benham a une technique tout aussi étonnante sur son instrument le piano qu'il a du abandonner, grotte oblige, pour un clavier électronique dont il a tiré malgré les  limites techniques de l'instrument le meilleur en adaptant vaillamment son jeu pour la circonstance. Leur duo  fut magique. Le public fut captivé tout en mettant de côté les 14 °C et l'humidité extrême propre à ce lieu. 

 texte Eric Rossignol, photo Marc Pivaudran Souillac en jazz

Joëlle Léandre, concert solo en église le 18 juillet 2021

 

Dimanche 18 juillet dans le cadre de Souillac en Jazz 2021 Joëlle Léandre a  donné en la belle église Saint Jacques de Calès un concert exceptionnel de musique improvisée sur l'instrument dont elle est demeure un des maîtres  mondiaux , la contrebasse. Sans microphone  en solo absolu  uniquement en jouant avec l'acoustique naturelle  de ce lieu particulièrement inspirant.
 
Ce concert fut donné d'une seule traite sans entracte  et fut  tout  du  long   d'une  grande intensité émotionnelle alliant par  l'archet ou en pizzicati,  les lignes mélodiques  les plus douces à celles les plus graves et viscérales, tout en superposant des effets percussifs et sa propre voix une autre face incontournable de son talent. Faisant vibrer par résonance comme peut être jamais l'acoustique de ce lieu. Tout en gardant néanmoins toujours un  discours musical  concis et construit. Et faisant vibrer aussi visiblement le cœur  d'un  public venu nombreux, attentifs, silencieux, recueillis dont les applaudissements entre chaque section furent à la fois marqués et respectueux sans venir couvrir la moindre résonance venue de l'instrument et de la voix.  L'artiste elle même s'est présentée de manière très simple au public sans cacher l'émotion qui visiblement l'habitait aussi ayant comme elle l'a  dit pendant le concert au public eut  très peu l'occasion de jouer en concert depuis le début de la crise sanitaire. Le public est sorti du concert tout simplement ému. Parmi les commentaires qui se sont exprimés on retiendra celui de Robert Peyrillou directeur artistique du festival : j'ai assisté à et organisé de nombreux concerts dans ma vie, celui de Joëlle Léandre ce soir  demeurera d'un importance toute particulière. Il est historique. 
texte Eric Rossignol, photos Jean-Claude Elisas Souillac en jazz 

"Joëlle Léandre, affamée" au cinéma de Souillac le 17 juillet 2021

 

Ce samedi 17 juillet à 21 h le cinéma Le Paris de Souillac a projeté en partenariat avec Souillac en Jazz le film documentaire "Affamée" du  réalisateur Christian Pouget. Il s'agit d'un portrait de la musicienne Joëlle Léandre. Contrebassiste, improvisatrice, vocaliste, compositrice. Une figure majeure du jazz contemporain et des musiques improvisées. Ce portrait alterne des scènes de répétitions d'une œuvre marquante écrite pour un orchestre de 10 musiciens: "Can You Hear Me" , et d' évocation par l'artiste elle même d' étapes importantes de sa vie personnelle qui ont structuré son développement musical. 

La projection  s'est déroulée en présence du réalisateur et la musicienne. Il a été prolongé d'un  échange long et intense avec le public présent qui a qui pu à loisir questionner directement Joëlle Léandre sur son développement personnelle  en étant issue d'un milieu sociale modeste, de sa formation musicale classique très complète en conservatoire suivi d'un travail avec certains des plus grand compositeurs de la fin du 20e siècle puis de sa découverte du jazz et son passage final  à l'improvisation et au "jazz free" en ayant collaboré avec certains de ses musiciens les plus emblématiques. Tous les spectateurs présents ont pu découvrir une artiste habitée qui leur a donné rendez en l'église de Calès le dimanche 18 juillet pour un concert de contrebasse en solo totalement improvisé, une formule rare et privilégiée dont elle a le secret. 
texte Eric Rossignol, photo Jean-Claude Elisas Souillac en jazz