26 janvier 2009

Monsieur Solal !


Nous sommes à Souillac en 1988, « Martial Solal est « en » son piano, imaginez un chapelet de touches blanches et noires tendu entre le jazz d’hier et le jazz d’aujourd’hui et un musicien fildefériste s’y tenant en équilibre ».
C’est plutôt dans cette posture qu’assis sur un tabouret que je le ressens !
« Ce pourrait être son portrait, osant figures les plus audacieuses et imprévisibles sur son piano. Ayant des difficultés à mémoriser (n’a-t-il pas été recalé à l’épreuve de lecture au concours d’entrée au conservatoire de Paris) il ne pouvait être qu’improvisateur. L’humour (sa version d’ « Il était un petit navire » est un chef d’œuvre du genre) parfois grinçant en fait un génie de la musique de Jazz, que dis-je de la Musique.
Tout le monde s’accorde à reconnaître en lui un des maîtres du jazz, qu’ils soient critiques mais aussi musiciens comme Ellington qui disait de lui qu’il avait : « …en abondance les éléments essentiels à un musicien : sensibilité, fraîcheur, créativité et une technique extraordinaire ».
Martial se lève de son piano, salue, remercie, sort, les spectateurs tapent du pied sur le parquet du palais des Congrès Martial revient, s’assoit, enchaîne sur un medley dont lui seul a le secret où on reconnaît Monk et enchaîne avec « Caravan » à qui il fait passer un mauvais quart d’heure et qui, pour notre plaisir met en valeur sa main gauche. Applaudissements, Martial s’approche du micro « je vais vous jouer encore un petit morceau parce que Eric LeLann n’est pas encore arrivé ! ».
Etait-ce leur première rencontre ? Une panne de voiture est peut-être à l’origine d’un CD et surtout d’une belle rencontre. Ce soir-là tout se termina « Round about midnight ».
Ce texte est dans « Histoires d’éloges », histoires de jazz à Souillac comme celle de Martial qu’il relate dans « Ma vie sur un tabouret » aux éditions Actes Sud.
Il se raconte avec la complicité de Franck Médioni, d’Alger à New York, du Club Saint-Germain à « A bout de souffle », de Sidney Bechet au solo, « Sans tambour ni trompette » ! C’est alerte, sautillant, le style a de l’humour, ses propos sur la presse et l’enseignement ne sont pas improvisés et la portée de chaque note, pesée, le discours est concis, pas de fioritures, il va à l’essentiel comme au piano. Le concert des mots est cours mais a-t-il tout dit ? Sa vie est aussi au bout de ses doigts, dans ses notes, dont on ne se rassasie pas, … ce livre c’est un peu « La suite en Ré bémol » … mais sans bémol.
Robert Peyrillou

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