La poésie, au fil des sons
La vitrine de la pizzeria Belfort à Toulouse paraît
banale bien qu’on y repère, si on fait attention, des affiches de spectacles
qui peuvent mettre la puce à l’oreille. Mercredi 22 janvier, comme nous l’avait
proposé Frédéric Cavallin, nous avons poussé la porte, commandé des pizzas,
puis nous sommes descendus dans la cave aménagée en salle de spectacle. Ce lieu,
habité de mots et de phrases, accueillait dans « Le cycle et le son des
mots » la Tentative de Sébastien
Lespinasse (mots), Frédéric Cavallin (batterie, percussions et autres objets
sonores) et Arnaud Rouanet (saxophone, clarinette basse, percussions de cuisine
et autres objets) pour une soirée dédiée à la rencontre et à l’improvisation. Le
batteur est venu jouer l’été dernier au festival de Souillac avec la formation
Pulcinella, le dimanche soir à Pinsac et le saxophoniste viendra, avec ses
acolytes du Trio d’en bas, en juillet 2013 dans les grottes de Lacave. Les mots
de Sébastien Lespinasse ne peuvent se passer de son, ils prennent vie, se
mêlent, se démêlent et s’entremêlent, au gré de son inventivité, démesurée. Qu’il
murmure, susurre ou crie, il nous prend aux tripes ; nous le prenons au
mot et nous laissons emporter dans le flux de sonorités, de jeu et de
provocations verbales. Alors d’autres sons y prennent part, frappés, lissés,
frottés, soufflés, criés ; la batterie enveloppe les bruits vocaux, les
contient puis les déborde ; clarinette et saxophone nous dévoilent des mélodies
possibles et impossibles. Tout tient à nous parler de nous, humains. Les deux
musiciens ont le plaisir de l’improvisation chevillé au corps et la joie d’inventer
resplendit autour des mots. Des dialogues s’instaurent : le saxophone
provoque les jeux vocaux, la batterie propose une mise en scène pour un nouveau
délire soufflé ; la poésie se laisse faire, elle chipe un rythme et s’y
complaît, elle attrape une mélodie et lui donne sens. Sébastien Lespinasse ose
Perec ; derrière lui flottent le fantôme de Vian, le rire de Michaux, les
élucubrations vocales de la bande à Lubat. Se laisser porter, envahir,
redécouvrir le langage et croire à la parole : les spectateurs,
extrêmement concentrés, n’en ont pas perdu une miette. Là, les mots perdant
leur signification cousent le sens au fil des sons. Marie-Françoise
Sébastien Lespinasse, poète
Frédéric Cavallin, batterie, percussions
Arnaud Rouanet, saxophone, clarinette basse et
percussions
Pizzeria
Belfort, 2 rue Bertrand de Born, Toulouse
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