25 avril 2008

Rocé invite Shepp

Hier soir, le centre culturel Jean Gagnant de Limoges affichait un prometteur "Rocé invite Archie Shepp". C'était donc l'occasion de voir et d'entendre la collaboration entre le trentenaire slameur au verbe et aux vers précis et le saxophoniste-agitateur qui, du free, du blues, du jazz, mêle, depuis toujours, musique, revendication sociale et engagement historique. Rocé l'a répété et Shepp en a fait un leitmotiv: "pas de genres". Il faut entendre, évidemment, pas de genres musicaux (Shepp déteste le mot "jazz") mais, en rencontrant, dans les vers déclamés, "racisme" ou encore "misogynie", on sait qu'il ne s'agit pas seulement de musique. Les mots peuvent changer le monde et Rocé nous présente une société (la sienne, la mienne, la nôtre) avec un bilan perturbé: violence, stigmatisation sont autant de signes d'une prétendue civilisation dont témoignent, dans une magnifique car très personnelle interprétation de Brel, "les singes de mon quartier".
Les mots s'enchaînent, scandés, sur un rythme rapide comme les notes sur la portée. La voix de Rocé est une boîte à rythmes et une ligne harmonique et cette narration, du quartier, de la pub, du métro, de l'école, nécessite une forte concentration. Derrière, Sil, à la contrebasse électrique, est un peu terne. En revanche, DJ Sparow, aux platines et aux samples, déroule un univers de sons, de timbres, de voix sur lequel Shepp n'a plus qu'à poser le son de son sax.
Gilles