20 octobre 2012

Quand David S.Ware passait par Souillac

Retour sur un évènement à "Souillac en jazz", c'était en 2003 et Marc répondait à un fan qui n'avait malheureusement pas pu venir au concert ! Ce jour-là Xavier Daverat de Jazz Magazine était là et avait écrit dans notre jazzette pour parler de David S.Ware et Olivier Soulié, photographe immortalisait la magie d'un concert qui réunissait ausssi Matthew Shipp, William Parker et Guillermo E.Brown, un all-stars.

Marc
"Je ne connaissais de DSW que sa version de la Freedom suite, et je trouvais ça plutôt bien, mais j'avais quelques inquiétudes par rapport à la réaction du public qui n'est pas tellement habitué à ce type de jazz. 
Il y une première partie durant laquelle ils ont joué "leur musique" avec deux (longs) morceaux, un premier assez free mais restant "accessible" au béotien que je suis, et un second avec une "mélodie" plus présente.
La seconde partie a été consacrée à la Freedom Suite, et j'ai trouvé que le concert apportait un réel plus par rapport au CD, surtout grâce à l'impression de puissance maîtrisée que donne ce quartet, vraiment très homogène.
A la sortie un superbe concert, pour moi le meilleur des trois soirées.
Il y avait deux fans irréductibles dans le public (qui le suivent partout en Europe), qui ont jugé le concert comme un des meilleurs qu'ils aient vu.
Une équipe de ciné-vidéastes a filmé le concert, dans le cadre d'un sujet sur DSW, à voir je-ne-sais-où je-ne-sais-quand..."


Chronique du concert qu'a aimablement écrit Xavier DAVERAT (de Jazz Mag) pour la Jazzette
(quotidien du festival)

"On savait que, chez David S. Ware, un jeu en vastes séquences vrillées renait l¹aspect d¹une pratique introvertie du coltranisme, cependant que la sonorité et la stature du saxophoniste poussaient plutôt vers une filiation rollinsienne. À l¹occasion du concert donné hier soir à Souillac, la dualité d¹inspiration Coltrane ­ Rollins a pris l¹allure d¹un conflit entre le legato naturel du jeu de ténor et la hachure systématique des phrases, entre les circonvolutions de sortes de schémas-gidouilles et la rectitude dans la conduite de l¹improvisation. Jouant à la croisée de deux tendances essentielles du saxophone moderne, David S. Ware mêle l¹ensemble dans une persistance du free jazz : surexpositions, notes-artefacts qui viennent s¹infiltrer dans la trame, accidents de phrasé, etc., participent de montages qui mettent les thèmes en lambeaux, d¹interprétations congédiant les marques du tempo pour un démentiel rubato, ou de démarrages en improbables marquages du temps. Ses échappées imprévisibles en font l¹un des plus tranchants représentants d¹un jazz libertaire, avec un jeu perpétuellement sur la corde raide : brusques sauts de tessitures, chuintements, étranglements
(mais sans faire couiner l¹anche), sonorité rauque, écorchée, rageuse, acheminement vers le cri. Chez Ware, vitalité rime avec trivialité. Son affection pour le travail avec les batteurs à tendance polyrythmique (auparavant : Andrew Cyrille, William Hooker, Beaver Harris) est prolongé ici avec Guillermo E. Brown, affolant le rapport du saxophone aux percussions même avec un musicien plus « dans la tradition » que ne le fut à ses côtés Susie Ibarra. L¹indéfectible présence du pianiste Matthew Shipp, capable de refonder un jeu puissamment charpenté (héritage de McCoy Tyner) comme de déconstruire chaque phrase (lignée de Don Pullen), demeure le meilleur support à ce jour du saxophoniste. Sans rompre avec son style et son répertoire (disques : Earthquation, Dao, SurrenderedŠ) la Freedom Suite de Rollins, en seconde partie de concert, lui offre l¹occasion non d¹une relecture ou d¹une réinterprétation, mais d¹une revisitation habitée, parsemée de moments extatiques (proche par deux fois du cantique et du spiritual) et de frénésie intense. Soit, pour l¹un des plus intègres et radicaux jazzmen du moment, l¹occasion de jeter le Œcorps impie¹ du musicien dans la lutte avec l¹instrument."
Xavier DAVERAT