Archie Shepp "Live in Souillac"

rendez-vous du 16 au 23 juillet 2022

Samedi 21 avril, il fait très chaud sur les allées Roosevelt, à Toulouse.
Sous un ciel impeccablement bleu, différents stands représentant le Lot étaient installés sur les allées Roosevelt de Toulouse.Légèreté.
Deuxième morceau.
Le bassiste monte dans le manège. « The Joker », tiré de l’album Transpacifik, enregistré avec une autre section rythmique : le titre donne le ton. Le jeu s’installe et le plaisir grandit. Les musiciens rient. Ils partagent. Ils s’aiment. Ils glissent des calembours musicaux, des jeux de notes, et l’auditeur ne peut que sourire avec eux, partager, aimer. Il est touché par leur complicité : un mot chuchoté par Bojan et la fin du thème se transforme en une courte impro qui devient à son tour l’intro du morceau suivant. Ils se regardent, ils se comprennent. Ils enchaînent car ce serait dommage de laisser le chantier en plan : on édifie et on construit encore, par-dessus. Les structures se complexifient, les influences se mélangent. Sur le Rhodes, Bojan développe des sonorités qui rappellent le « I’m going home » que « Ten years after » donnèrent à Woodstock.
Pourtant, il s’agit bien de jazz. Liberté et intensité.
L’énergie déborde. Les corps se contorsionnent. L’investissement physique est total. Sidérant : invasion de trois claviers par un seul homme, ses deux bras, ses dix doigts. Et les visages, les sourires échangés, les mimiques de la concentration. L’énergie aussi est concentrée dans un flux circulant entre les trois musiciens, qui ne font plus qu’un. Plus qu’une : la musique. L’énergie jaillit jusqu’au défoulement, jusqu’au déchaînement, jusqu’au déchirement. Les structures finissent par lâcher, les liens cèdent, les constructions s’écroulent, les convictions sont à terre. Un rouleau compresseur ; pas pour écraser mais pour étaler. Avec une même quantité de matière, la surface recouverte est de plus en plus grande : expansion à chaque phrase.
Et la finesse est toujours là, seul élément invariable dans cette valse des variations. Le batteur, par exemple, trace des sons avec sa baguette. Des lignes mélodiques, comme on dessine une rosace dans le sable. D’ailleurs, si on écoute bien, la mer n’est pas loin. Ou plutôt, si on regarde bien. Comme au cinéma, un univers nous a été donné à voir. Pas la musique d’un film, non : de la musique qui s’accompagne d’images, qui les fait naître… Imaginez !
Juliette
Vous ne les trouverez pas dans le rayon "jazz". IL faudra se diriger vers celui de la musique électronique. Or, malgré un "No" pour le moins imposant, on est dans une des branches que le jazz a su investir avec succès. Il y a des formations et des expériences qui mélangent jazz et slam, jazz et hip hop, comme il y a eu du jazz-rock. Si le terme "fusion" n'était pas aussi étroitement lié aux années 1970 et si des formations de renommée internationale n'avaient pas fait passer la fusion du terme à un type, il serait parfait pour qualifier ce mélange des genres. Rappeur invité, sons électroniques, tenues extravagantes, jeux de scène ultra-toniques, son de trompette qui rappelle Miles Davis électrique ou Erik Truffaz, batteur-guitariste, clavieriste martien, platiniste, No Jazz relève de cette fusion et c'est peut-être à ce titre que ce "No" est si provocateur et si lapidaire.